Alors que ce long mois de janvier se termine (enfin) mais que l’hiver n’a toujours pas tiré sa révérence, il est temps de s’échapper avec conte de printemps. Ce film (évidemment) sorti au printemps, ouvre en 1990 le cycle des quatre saisons d’Eric Rohmer.

Jeanne, jeune professeur de philosophie vit avec Matthieu. Lors d’une soirée, elle rencontre Natacha, pianiste habitant chez son père. Cette rencontre initiera un changement chez Jeanne : doit elle rester avec Matthieu ? Et lorsque le père de Natacha se met à lui faire des avances, que deviendra sa relation avec le jeune homme ? Doit-on préciser que le père de Natacha a une petite amie, Eve, que Jeanne déteste ? Réel chassé-croisé amoureux mais aussi amical, ce film ne cessera de vous faire sourire et de vous intriguer.

Véritable bond dans le passé, entre pantalons taille haute ou téléphone filaire, le film nous apporte un pur moment de fraîcheur et d’insouciance. Mais plus qu’un simple retour dans le passé, ce premier opus à quelque chose de très actuel et d’intemporel : la crise d’un amour naissant. Et c’est sûrement ça qui fait la force de Rohmer, sa capacité de retranscrire des moments simples de la vie, avec insouciance. Qui n’est jamais parti quelques jours à la campagne ? Qui ne s’est jamais lié d’amitié suite à une rencontre hasardeuse à une fête ? Ou encore qui n’a jamais vécu une crise amoureuse ? Dans la moindre discussion anodine tout reflète l’authenticité et l’amitié.

Ces mêmes valeurs se retrouvent jusque dans le jeu des acteurs, inexpérimentés, qui nous font sourire par la maladresse de leurs gestes ou la sincérité de leurs discussions. Ici, on parle du jardinage et de philosophie, du printemps ou du temps qui passe. Ces acteurs incarnant des personnages libérés de toutes contraintes rappelleront à certains leurs jeunes années, pour d’autres, leur quotidien

Cette retransmission d’un quotidien, somme toute anodin, entraîne confusion et désordre ce qui donne au film toute sa magie. Cette confusion se retrouve dans les relations des personnages avec un amant caché ou dans l’histoire elle-même, entre collier disparu et la présence de deux maisons dans lesquels Jeanne ne veut pas rester. Ce désordre sera prééminent tout au long du film, de la première scène, qui s’ouvre sur une chambre jusqu’à la dernière, avec le mystérieux retour du collier disparu.

Rohmer va jusqu’à nous retirer certains éléments du scénario : comment est Matthieu, ce garçon qui n’apparaît jamais à l’écran ? Et que dire de la fameuse affaire du collier, non résolue, qui constitue une histoire dans l’histoire…
On pourra éventuellement reprocher à Rohmer une fin …. sans véritable fin, qui reste sur une incertitude, sans morale. Mais c’est peut-être dans cela que réside le charme du film… la possibilité d’imaginer ce qu’il s’est réellement passé.

Un classique de la nouvelle vague, idéal pour vous plonger dans l’univers du réalisateur. Entre petits moments du quotidien, désir et philosophie, il n’y a qu’à se laisser porter au gré des intrigues et de l’évolution de Jeanne. Conte de Printemps est un film à voir (ou à revoir), sous votre couette en attendant que les premiers jours de printemps pointent le bout de leur nez.

Salomé Ferraris

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