Les Eblouis est le premier film de Sarah Suco, qui y dépeint sa propre expérience dans une communauté charismatique. Sorti le 20 novembre 2019 en France après avoir été projeté au Festival du film d’Angoulême, c’est un drame dans lequel on retrouve plusieurs acteurs connus (Camille Cottin, Jean-Pierre Darroussin, Eric Caravaca), et où on en découvre de nouveaux, tout aussi prometteurs, comme Céleste Brunnquel, le personnage principal.

Il raconte comment, à l’initiative d’une mère souffrante, une famille rejoint la communauté religieuse de la Colombe, dont l’influence se fait de plus en plus pesante.

On suit les pérégrinations de Camille Loubnel, 12 ans, alors que sa famille rejoint la communauté dans une volonté de renouer avec ses valeurs chrétiennes et offrir sa vie à un groupe plutôt que se conformer à l’individualisme de la société. Cette décision se base également sur le besoin de la mère de soigner certaines blessures de sa jeunesse.

Le film se concentre sur la description des relations de la famille et la façon dont le groupe les modifie, tout d’abord en agissant au sein même de la famille (par l’interdiction de certaines activités aux enfants, par exemple), puis en la coupant progressivement du reste du monde, représenté par les camarades et les grands-parents de Camille.

L’aspect religieux de cette communauté charismatique met en valeur l’opposition qu’il y a entre les principes a priori inoffensifs mis en avant et les pratiques parfois extrêmes, comme les séances d’exorcisme pour purifier les fidèles ou la cellule d’isolement afin d’expier des fautes commises à l’encontre de la communauté. Toutes les pratiques déviantes de la communauté ne tardent pas à en faire un endroit malsain, derrière des dehors éblouissants.

Ce film, c’est aussi l’histoire de l’adolescence, avec ses difficultés, ses premières amours et son impétuosité, le tout caché derrière un visage de pierre. Camille se situe entre les 2 mondes, et on s’attache vite à son côté spontané et authentique. Elle est l’élément moteur du film, car en poursuivant sa quête d’émancipation, elle se heurte à la volonté dominatrice de la communauté.

Face à elle, la plupart des autres personnages paraissent peu attachants : on a affaire à beaucoup de stéréotypes (le père lâche, la mère meurtrie, etc.) qui donnent un côté universel à l’histoire. De plus, il y a un côté très réaliste dans la manière de filmer et d’enregistrer les voix : les acteurs bafouillent parfois, se reprennent. Cela contribue à ancrer le film dans la réalité, mais le rend assez dérangeant par moment, au point qu’on a parfois l’impression de voir un documentaire plus qu’une fiction.

On peut cependant trouver dommage de ne pas avoir un point de vue plus nuancé sur ce genre de communauté, qui se trouve complètement diabolisé dans le film, et qui peut donner lieu à des amalgames entre religion traditionnelle et communautés déviantes.

Je vous conseille d’aller le voir si vous aimez le cinéma français, et que vous êtes curieux.se de voir comment une communauté peut imposer son emprise aux individus. Ce n’est pas un film amusant (et ce n’est pas son but) et il est parfois dur, mais il reste intéressant à méditer.

Gaspard Martin-Lavigne

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