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/!\ spoilers
Fermez les yeux et imaginez… Il est 20h, vous rentrez chez vous. La rue est étrangement calme. Mais ce n’est pas le calme apaisant de la mer ou des grandes prairies. C’est le calme inquiétant, le calme avant la tempête. Vous savez, ce moment qui précède l’apocalypse, juste avant que la bulle de paix n’éclate en mille morceaux comme une boule de cristal. Un sentiment étrange s’empare de vous… Cela vous interpelle, mais vous continuez votre route. Le soleil baisse à l’horizon et le ciel se teinte d’une lueur sanglante. Les ombres s’étirent sur le macadame brûlant et seuls quelques grincements lointains brisent le silence de mort… La lumière s’évanouit et vous pressez le pas. Dans cette obscurité grandissante, vous arrivez chez vous. La lumière du porche ne s’allume pas. Agacé.e, vous donnez un coup vigoureux sur l’interrupteur. Toujours rien. Ce n’est pas normal, vous froncez les sourcils. C’est alors que vous remarquez la porte entrebâillée. Pourtant, vous êtes convaincu.e de l’avoir fermée à double tour en partant ce matin. Vous la poussez doucement, elle s’ouvre seule… quelque chose cloche. Vous vivez seul.e et l’unique clef est encore dans votre poche. Que se passe-t-il ? Un frisson vous traverse, un souffle glacé vous caresse la nuque… Vous tournez la tête à droite, à gauche, comme si l’explication se cachait derrière les angles de la maison. Mais non, tout est calme, silencieux, trop silencieux… Votre instinct vous dit de tourner les talons, mais vous restez sur le palier de la porte, scrutant vainement l’intérieur du couloir. Vos yeux distinguent à peine les murs dans la pénombre qui semble venir à vous. Des ombres se dessinent au fond du couloir, discrètes, furtives. Vous pourriez presque croire qu’elles sont le fruit de votre imagination. Mais progressivement elles s’épaississent, elles rampent vers vous, silencieusement, dangereusement, comme le fauve, tapis dans l’ombre, qui s’apprête à sauter sur sa proie… Et soudain il est sur vous ! Les yeux exorbités, les mains décharnées, quelques lambeaux de chair encore accrochés aux dents ! La silhouette cadavérique vous saisit, affamée, excitée par l’odeur de vos tripes. Et votre corps ne vous crie qu’une chose : FUYEZ !
Bienvenue dans The Walking Dead.
La première chose que l’on note, c’est l’excellente direction artistique avec des couleurs ternes et une bande son qui reflètent parfaitement l’ambiance mortifère de la série. J’ai tendance à dire que, parfois, on peut juger de la qualité d’une série à son générique : pour The Walking Dead, c’est le cas. Les images qui s’assombrissent progressivement, comme rongées par la mort, les plans de désolation, et les flashs couleur sang, évoquent les zombies toujours plus nombreux qui menacent sans cesse les survivants et apparaissent subitement au détour d’une rue déserte. La bande son, ponctuée par des bruits métalliques, rappelle la fuite et la peur sans fin du groupe que l’on suit : Rick Grimes, personnage principal et leader du groupe, sa femme Lori, son fils Carl, Andrea Harrison et sa soeur Amy, Daryl Dixon, Glenn Rhee, Carol Peletier, et quelques autres survivants.
Cadavres, mort-vivants, combats et violence psychologique, les âmes sensibles seront probablement choquées par tant d’horreur. Mais ce n’est pas cette horreur sanglante, caractérisée par des effusions de sang inutiles. Ça, ce n’est pas de l’horreur, c’est du gore. Si The Walking Dead est une série si incroyable, c’est qu’elle suggère l’horreur sans forcément l’exposer de manière explicite. Dans la saison 3, la femme de Rick Grimes accouche dans des conditions terribles, au milieu d’une prison abandonnée et infestée de walkers. Suite à des complications, l’une des survivantes du groupe est contrainte de réaliser une césarienne, ce qui condamne automatiquement la mère. Une fois le nouveau né arrivé, elle doit abandonner Lori qui baigne dans son sang, des morts-vivants affluant de toutes parts. Carl, pour abréger les souffrances de la mère, se retrouve contraint de lui tirer une balle dans la tête. Une fois que la situation s’est relativement calmée, Rick part à la recherche de sa femme. Nous le voyons alors arriver dans la salle, où l’on ne voit qu’une partie du cadavre, déchiqueté, et plus loin, un zombie somnolent, avec le ventre anormalement gonflé. Rick, hors de lui, s’approche du zombie, un couteau à la main, et s’apprête à lui ouvrir le ventre. Cut. La scène s’arrête avant que nous puissions voir Rick ouvrir en deux le zombie pour récupérer les restes de sa femme et les enterrer. Certains diront que c’est probablement moins violent pour le spectateur… Mais je ne suis pas d’accord. Car exposer l’horreur sur un écran, c’est l’extérioriser, la mettre à distance. Alors que si vous suggérez l’horreur, vous laissez le spectateur imaginer par lui-même la suite, et lui seul sera capable d’imaginer le pire, en fonction de ce qui le terrifie le plus. Cela rejoint ce que Barthes écrivait dans Mythologies à propos des “photos-chocs”. Les “photos-chocs”, qui sont excessivement dramatiques et imposent une vision des choses (ici de l’horreur), un sens trop évident, privent le spectateur de son autonomie interprétative. Ces images ne laissent pas la place à l’imagination du spectateur, or c’est elle qui est parfois la plus efficace pour faire naître des émotions. C’est donc cette approche de l’horreur qui fait, selon moi, la force de cette série, qui alterne entre faux moments de tranquillité, où l’on sent la présence invisible des walkers qui rôdent comme une épée de Damoclès, et les moments de violence et d’action qui arrivent brutalement, faisant éclater les quelques bulles de paix.
Malheureusement, comme toute série qui s’éternise, la qualité baisse au fil des saisons. Si les trois premières saisons sont absolument passionnantes, la quatrième présente déjà des défauts majeurs : l’intrigue ne se concentre plus vraiment sur la survie face aux walkers, mais plutôt sur les relations entre les différents groupes de survivants. Par ailleurs, la communauté introduite dans la saison 4 et qui devient l’ennemie du groupe de Rick est extrêmement stéréotypée. Son chef est LA caricature du grand méchant, qui cache en réalité un passé douloureux. Bref, comme toujours, prolonger une série pour surfer sur le succès n’est jamais bon. Néanmoins, The Walking Dead reste un classique à voir… si vous l’osez.
Ludivine Million